11 oct. 2008

Désert - JMG Le Clézio - extrait



LITTÉRATURE AUDIO VIDÉO




Désert de JMG Le Clézio. Éditions Gallimard

Extrait :



Saguiet el Hamra, hiver 1909 – 1910
Ils sont apparus, comme dans un rêve, au sommet de la dune, à demi cachés par la brume de sable que leurs pieds soulevaient. Lentement ils sont descendus dans la vallée, en suivant la piste presque invisible. En tête de la caravane, il y avait les hommes, enveloppés dans leurs manteaux de laine, leurs visages masqués par le voile bleu. Avec eux marchaient deux ou trois dromadaires, puis les chèvres et les moutons harcelés par les jeunes garçons. Les femmes fermaient la marche. C’étaient des silhouettes alourdies, encombrées par les lourds manteaux, et la peau de leurs bras et de leurs fronts semblait encore plus sombre dans les voiles d’indigo.
Ils marchaient sans bruit dans le sable, lentement, sans regarder où ils allaient. Le vent soufflait continûment, le vent du désert, chaud le jour, froid la nuit. Le sable fuyait autour d’eux, entre les pattes des chameaux, fouettait le visage des femmes qui rabattaient la toile bleue sur leurs yeux. Les jeunes enfants couraient, les bébés pleuraient, enroulés dans la toile bleue sur le dos de leur mère. Les chameaux grommelaient, éternuaient. Personne ne savait où on allait.
Le soleil était encore haut dans le ciel nu, le vent emportait les bruits et les odeurs. La sueur coulait lentement sur le visage des voyageurs, et leur peau sombre avait pris le reflet de l’indigo, sur leurs joues, sur leurs bras, le long de leurs jambes. Les tatouages bleus sur le front des femmes brillaient comme des scarabées. Les yeux noirs, pareils à des gouttes de métal, regardaient à peine l’étendue de sable, cherchaient la trace de la piste entre les vagues des dunes.
Il n’y avait rien d’autre sur la terre, rien, ni personne. Ils étaient nés du désert, aucun autre chemin ne pouvait les conduire. Ils ne disaient rien. Ils ne voulaient rien. Le vent passait sur eux, à travers eux, comme s’il n’y avait personne sur les dunes. Ils marchaient depuis la première aube, sans s’arrêter, la fatigue et la soif les enveloppaient comme une gangue. La sécheresse avait durci leurs lèvres et leur langue. Ma faim les rongeait. Ils n’auraient pas pu parler. Ils étaient devenus, depuis si longtemps, muets comme le désert, pleins de lumière quand le soleil brûle au centre du ciel vide, et glacés de la nuit aux étoiles figées.
Ils continuaient à descendre lentement la pente vers le fond de la vallée, en zigzaguant quand le sable s’éboulait sous leurs pieds. Les hommes choisissaient sans regarder l’endroit où leurs pieds allaient se poser. C’était comme s’ils cheminaient sur des traces invisibles qui les conduisaient vers l’autre bout de la solitude, vers la nuit. Un seul d’entre eux portait un fusil, une carabine à pierre au long canon de bronze noirci. Il la portait sur sa poitrine, serrée entre ses deux bras, le canon dirigé vers le haut comme la hampe d’un drapeau. Ses frères marchaient à côté de lui, enveloppés dans leurs manteaux, un peu courbés en avant sous le poids de leurs fardeaux. Sous leurs manteaux, leurs habits bleus étaient en lambeaux, déchirés par les épines, usés par le sable. Derrière le troupeau exténué, Nour, le fils de l’homme au fusil, marchait devant sa mère et ses sœurs. Son visage était sombre, noirci par le soleil, mais ses yeux brillaient, et la lumière de son regard était presque surnaturelle.
Ils étaient les hommes et les femmes du sable, du vent, de la lumière, de la nuit. Ils étaient apparus, comme dans un rêve, en haut d’une dune, comme s’ils étaient nés du ciel sans nuages, et qu’ils avaient dans leurs membres la dureté de l’espace. Ils portaient avec eux la faim, la soif qui fait saigner les lèvres, le silence dur où luit le soleil, les nuits froides, les lueurs de la Voie lactée, la lune ; ils avaient avec eux leur ombre géante au coucher du soleil, les vagues de sable vierge que leurs orteils écartés touchaient, l’horizon inaccessible. Ils avaient surtout la lumière de leur regard, qui brillait si clairement dans la sclérotique de leurs yeux.
Tous droits réservés

© Editions Gallimard




Ressources audiovisuelles (émissions radio, podcast, vidéos)
Le Clézio Audio / Vidéo http://www3.unileon.es/dp/dfm/flenet/docauteurs20siecle.html#LeClezio
J.M.G. Le Clezio Nobel de littérature
LITTÉRATURE AUDIO VIDÉO

27 mai 2008

Tâches audiovisuelles de production orale - Revue THOT




Les professeurs de français se demandent souvent comment motiver les étudiants en intégrant les nouvelles technologies en classe. Dans l'enseignement d'une langue étrangère, les outils de communication sont en pleine expansion sur internet. Normalement, les étudiants dépassent les enseignants dans la maîtrise des réseaux sociaux et ils savent se servir des chats en direct, des espaces audio ou des communautés de partage de musique, podcats ou vidéo.

L'université de León en Espagne fait des expériences pédagogiques remarquables pour favoriser la compréhension et la production orales en utilisant les dernières tendances sur le web. Ainsi le projet FLENET (Français langue étrangère et Internet) teste les grandes communautés de partage de vidéo dans des espaces comme Dailymotion FLE ou Campus Blip.tv et présente des reportages sur les weblogs en éducation sur Google Video ou des émissions en direct de la classe sur le site UStream TV - Canal Campus ainsi que sur Mogulus Canal Campus.


Voir: Tâches étudiants sur Ustream.tv

Différentes activités pédagogiques pour la pratique du français langue étrangère peuvent être développées, comme par exemple la découverte de Paris vu de la tour Eiffel, la rédaction de tâches dans un weblog Campus Virtuel FLE, l'enregistrement de séquences audio ou podcast individuels comme Jamglue - Patricia ou la création d'avatars audio avec Voki - Tâche prononciation.

On peut aussi intégrer des activités vidéo dans le cadre cyberallyes FLE ou scénarios pédagogiques dirigés par l'enseignant, qui conjuguent les production écrites dans les blogs des étudiants, leurs productions orales type podcasts ou l'enregistrement de séquences vidéo avec une webcam grâce à UStream TV, comme par exemple la préparation, discussion et lecture d'un poème de Baudelaire entre deux étudiants dans la tâche BaudelaireEduEnri.

Ces tâches de communication et d'intégration des NTIC en classe de français constituent en même temps des expériences qui permettent aux enseignants et aux apprenants universitaires de découvrir des ressources, des outils et des méthodologies afin de favoriser la compréhension et la production orales, ainsi que la collaboration et la communication entre étudiants, éléments si décisifs pour l'enseignement / apprentissage d'une langue étrangère (voir aussi d'autres recherches du laboratoire pédagogique qui font parti du projet Flenet - Universidad de León).
Autour de 2000 personnes ont participé au projet depuis 2001 avec des collaborations avec les universités de Grenoble, Strasbourg, Lille, Oviedo, Complutense de Madrid et de Granada.

©Thot/Cursus

http://thot.cursus.edu/rubrique.asp?no=27772